I change myself, I change the world », soutient Gloria Anzaldúa dans Borderlands/La Frontera. C’est dans la foulée de leur lecture des travaux de la théoricienne chicana que Nicholas Dawson et Karine Rosso se sont rencontré·e·s pour écrire Nous sommes un continent, cette correspondance mestiza au potentiel transformateur. Ancrées dans leur pratique d’écriture et dans leur appartenance au milieu universitaire montréalais, les lettres échangées par Karine et Nicholas sont, comme l’explique Pierre-Luc Landry dans sa préface, une main tendue, une invitation, un engagement : l’autrice et l’auteur ne parlent pas en vase clos ou dans une chambre d’écho, mais s’adressent plutôt au vaste monde, à un lectorat disposé à les accompagner dans leurs réflexions culturelles, sociales et politiques.« Anzaldúa n’écrit jamais seule. Nous écrivons ensemble, toi et moi, mais aussi avec elle, solidaires avec toutes celles qui ont écrit avec elle. Pour cela, malgré nos mouvements et nos angoisses, je ne crois pas que nous ayons terminé de nous écrire. Ceci est à la fois une certitude et un souhait. […] Tout ce que nous pouvons, devant ces sentiments d’injustice, de nostalgie et de colère, c’est tenter la solidarité, écrire la colère, dire la colère, nous rassembler aussi par elle. Et solidairement, la rendre effective, productrice de sens, créatrice de ponts, de communautés, de diasporas. C’est aussi cela, peut-être, ce continent que nous nous écrivons.