Aujourd'hui nous ne tenons plus les gens du Moyen Âge pour des brutes aux émotions exacerbées. Bien qu'ils eussent une culture affective fort différente de la nôtre, nous savons que les médiévaux, comme nous, naviguaient avec l'émotion et en connaissaient la contagion sociale. Dans cette civilisation du geste et de l'oralité, l'émotion – raffinée et exaltée, discutée et ritualisée – était au cœur des pratiques de gouvernement et des stratégies de pouvoir. Ce sont ces politiques médiévales des émotions que le livre explore, en partant d'interrogations suscitées par un dialogue avec les sciences sociales de l'affectivité. Après une ouverture consacrée aux conditions d'une histoire politique des émotions médiévales, la première partie s'interroge sur les façons dont les gouvernants usaient de leurs émotions, qu'elles fussent ressenties et/ou scénarisées, ou au contraire tenues à distance. Une deuxième partie questionne l'encadrement des émotions des populations et la troisième porte sur l'existence d'émotions communautaires. L'émotion, loin d'être un pur instrument des arts de gouverner au Moyen Âge, apparaît dans tous les cas comme un facteur, voire comme un agent de la transformation historique.
Auteure UQAM: Nagy Piroska